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Elle observa le même signe sur les narines et sur les ailes du nez.

— Voyons, dit-elle, en regardant autour du prince.

Et la première chose qu’elle vit, ce fut le flambeau, dans lequel s’était consumée toute la bougie allumée la veille au soir par Remy,

— Cette bougie a brûlé longtemps, dit-elle, donc il y a longtemps que François était dans cette chambre. Ah ! voici un bouquet sur le tapis…

Catherine le saisit précipitamment, puis, remarquant que toutes les fleurs étaient encore fraîches, à l’exception d’une rose qui était noircie et desséchée :

— Qu’est cela ? murmura-t-elle ; qu’a-t-on versé sur les feuilles de cette fleur ?… Je connais, il me semble, une liqueur qui fane ainsi les roses.

Elle éloigna le bouquet d’elle en frissonnant :

— Cela m’expliquerait les narines et la dissolution des chairs du front ; mais les lèvres ?

Catherine courut à la salle à manger. Les valets n’avaient pas menti, rien n’indiquait qu’on eût touché au couvert depuis la fin du repas.

Sur le bord de la table, une moitié de pêche, dans laquelle s’imprimait un demi-cercle de dents, fixa plus particulièrement les regards de Catherine.

Ce fruit, si vermeil au cœur, avait noirci comme la rose et s’était émaillé au dedans de marbrures violettes et brunes.

L’action corrosive se distinguait plus particulièrement sur la tranche, à l’endroit où le couteau avait dû passer.

— Voilà pour les lèvres, dit-elle ; mais François a mordu seulement une bouchée dans ce fruit. Il n’a pas tenu longtemps à la main ce bouquet, dont les fleurs sont encore fraîches ; le mal n’est pas sans remède, le poison ne peut avoir pénétré profondément.

Mais alors, s’il n’a agi que superficiellement, pourquoi