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— Cela m’est impossible, mon frère.

— À cause de vos désirs de retraite, de vos projets d’austérité ?

— Oui, mon frère.

— Vous êtes allé au roi demander une dispense ?

— Qui vous a dit cela ?

— Je le sais.

— C’est vrai, j’y suis allé.

— Vous ne l’obtiendrez pas.

— Pourquoi cela, mon frère ?

— Parce que le roi n’a pas intérêt à se priver d’un serviteur tel que vous.

— Mon frère le cardinal fera alors ce que Sa Majesté ne voudra pas faire.

— Pour une femme, tout cela !

— Anne, je vous en supplie, n’insistez pas davantage.

— Ah ! soyez tranquille, je ne recommencerai pas ; mais, une fois, allons au but. Vous partez pour Château-Thierry ; eh bien ! au lieu de revenir aussi précipitamment que vous le voudriez, je désire que vous m’attendiez dans mon appartement ; il y a longtemps que nous n’avons vécu ensemble ; j’ai besoin, comprenez cela, de me retrouver avec vous.

— Mon frère, vous allez à Château-Thierry pour vous amuser, vous. Mon frère, si je reste à Château-Thierry, j’empoisonnerai tous vos plaisirs.

— Oh ! que non pas ! je résiste, moi, et suis d’un heureux tempérament, fort propre à battre en brèche vos mélancolies.

— Mon frère…

— Permettez, comte, dit l’amiral avec une impérieuse insistance, je représente ici notre père, et vous enjoins de m’attendre à Château-Thierry ; vous y trouverez mon appartement qui sera le vôtre. Il donne, au rez-de-chaussée, sur le parc.