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Puis, lorsque le récit fut fini, il se leva et alla s’agenouiller devant le prie-Dieu de son oratoire, fit son oraison, et, un instant après, revint avec un visage parfaitement rasséréné.

— La ! dit-il, j’espère que je prends les choses en roi. Un roi soutenu par le Seigneur est réellement plus qu’un homme. Voyons, comte, imitez-moi, et puisque votre frère est sauvé comme le mien, Dieu merci ! eh bien, déridons-nous un peu.

— Je suis à vos ordres, sire.

— Que veux-tu pour prix de tes services, du Bouchage ? parle ?

— Sire, dit le jeune homme en secouant la tête, je n’ai rendu aucun service.

— Je le conteste ; mais, en tous cas, ton frère en a rendu.

— D’immenses, sire.

— Il a sauvé l’armée, dis-tu, ou plutôt les débris de l’armée ?

— Il n’y a pas, dans ce qu’il en reste, un seul homme qui ne vous dise qu’il doit la vie à mon frère.

— Eh bien, du Bouchage, ma volonté est d’étendre mon bienfait sur vous deux, et j’imiterai en cela le Seigneur tout-puissant qui vous a protégés d’une façon si visible en vous faisant tous deux pareils, c’est-à-dire riches, braves et beaux ; en outre j’imiterai ces grands politiques si bien inspirés toujours, lesquels avaient pour coutume de récompenser les messagers de mauvaises nouvelles.

— Allons donc ! dit Chicot, je connais des exemples de messagers pendus pour avoir été porteurs de mauvais messages.

— C’est possible, dit majestueusement Henri ; mais il y a le sénat qui a remercié Varron.

— Tu me cites des républicains. Valois, Valois, le malheur te rend humble.

— Voyons, du Bouchage, que veux-tu ? que désires-tu ?