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laissé, et laissé pour un dessein quelconque, crois-moi.

— Oh ! sur lui, Madame, je croirai tout ce que vous voudrez.

— Me connaît-il ?

— Je ne crois pas.

— Et t’a-t-il reconnu ?

— Oh ! moi, Madame, répondit Remy avec un triste sourire, moi, l’on ne me reconnaît pas.

— Il m’a devinée, peut-être ?

— Non, car il a demandé à vous voir.

— Remy, je te dis que, s’il ne m’a point reconnue, il me soupçonne.

— En ce cas, rien de plus simple, dit Remy d’un air sombre, et je remercie Dieu de nous tracer si franchement notre route ; le bourg est désert, l’infâme est seul, comme je suis seul… j’ai vu un poignard à sa ceinture… j’ai un couteau à la mienne.

— Un moment, Remy, un moment, dit Diane ; je ne vous dispute pas la vie de ce misérable, mais, avant de le tuer, il faut savoir ce qu’il nous veut, et si, dans la situation où nous sommes, il n’y a pas moyen d’utiliser le mal qu’il veut nous faire. Comment s’est-il présenté à vous, Remy ?

— Comme l’intendant de M. du Bouchage, Madame.

— Tu vois bien, il ment ; donc il a un intérêt à mentir. Sachons ce qu’il veut, tout en lui cachant notre volonté à nous.

— J’agirai selon vos ordres, Madame.

— Pour le moment, que demande-t-il ?

— À vous accompagner.

— En quelle qualité ?

— En qualité d’intendant du comte.

— Dis-lui que j’accepte.

— Oh ! Madame !

— Ajoute que je suis sur le point de passer en Angleterre, où j’ai des parents, et que cependant j’hésite ; mens