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Diane, adoucissait encore la lumière et rafraîchissait la teinte du visage de la dormeuse. Les yeux fermés, ces yeux aux paupières veinées d’azur, la bouche suavement entr’ouverte, les cheveux rejetés en arrière par-dessus le capuchon du grossier vêtement d’homme qu’elle portait, Diane devait apparaître comme une vision sublime aux regards qui s’apprêtaient à violer le secret de sa retraite.

Le duc, en l’apercevant, ne put retenir un mouvement d’admiration ; il s’appuya sur le bord de la fenêtre, et dévora des yeux jusqu’aux moindres détails de cette idéale beauté. Mais tout à coup, au milieu de cette contemplation, ses sourcils se froncèrent ; il redescendit deux échelons avec une sorte de précipitation nerveuse.

Dans cette situation, le prince n’était plus exposé aux reflets lumineux de la fenêtre, reflets qu’il avait paru fuir ; il s’adossa donc au mur, croisa ses bras sur sa poitrine, et rêva.

Aurilly, qui ne le perdait pas des yeux, put le voir avec ses regards perdus dans le vague, comme sont ceux d’un homme qui appelle à lui ses souvenirs les plus anciens et les plus fugitifs.

Après dix minutes de rêverie et d’immobilité, le duc remonta vers la fenêtre, plongea de nouveau ses regards à travers les vitres, mais ne parvint sans doute pas à la découverte qu’il désirait, car la même ombre resta sur son front et la même incertitude dans son regard.

Il en était là de ses recherches, lorsque Aurilly s’approcha vivement du pied de l’échelle.

— Vite, vite, Monseigneur, descendez, dit Aurilly, j’entends des pas au bout de la rue voisine.

Mais au lieu de se rendre à cet avis, le duc descendit lentement, sans rien perdre de son attention à interroger ses souvenirs.

— Il était temps ! dit Aurilly.

— De quel côté vient le bruit ? demanda le duc.