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La chambre dans laquelle Henri avait enfermé Diane était tapissée de nattes et meublée d’un grand lit de chêne, avec des rideaux de serge, d’une table et de quelques chaises.

La jeune femme, dont le cœur paraissait soulagé d’un poids énorme depuis cette fausse nouvelle de la mort du prince, qu’elle avait apprise au camp des gendarmes d’Aunis, avait demandé à Remy un peu de nourriture, que celui-ci avait montée avec l’empressement d’une joie indicible. Pour la première fois alors, depuis l’heure où Diane avait appris la mort de son père, Diane avait goûté un mets plus substantiel que le pain ; pour la première fois, elle avait bu quelques gouttes d’un vin du Rhin que les gendarmes avaient trouvé dans la cave et avaient apporté à du Bouchage.

Après ce repas, si léger qu’il fût, le sang de Diane, fouetté par tant d’émotions violentes et de fatigues inouïes, afflua plus impétueux à son cœur, dont il semblait avoir oublié le chemin ; Remy vit ses yeux s’appesantir et sa tête se pencher sur son épaule. Il se retira discrètement, et, comme on l’a vu, se coucha sur le seuil de la porte, non qu’il eût la moindre défiance, mais parce que, depuis le départ de Paris, c’était ainsi qu’il agissait.

C’était à la suite de ces dispositions, qui assuraient la tranquillité de la nuit, qu’Aurilly était monté et avait trouvé Remy couché en travers du corridor.

Diane, de son côté, dormait le coude appuyé sur la table, sa tête appuyée sur sa main. Son corps souple et délicat était renversé de côté sur sa chaise au long dossier ; la petite lampe de fer placée sur la table, près de l’assiette à demi garnie, éclairait cet intérieur qui paraissait si calme à la première vue, et dans lequel venait cependant de s’éteindre une tempête qui allait se rallumer bientôt.

Dans le cristal rayonnait, pur comme du diamant en fusion, le vin du Rhin à peine effleuré par Diane ; ce grand verre ayant la forme d’un calice, placé entre la lampe et