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soles étaient chargées de sabres, d’épées et de pistolets ; tous les angles contenaient un nid de mousquets et d’arquebuses.

Chicot s’arrêta un instant dans cette chambre ; il éprouvait le besoin de réfléchir.

— On me cache Jacques, on me cache la dame, on me pousse par les petits degrés pour laisser le grand escalier libre, cela veut dire que l’on veut m’éloigner du moinillon et me cacher la dame, c’est clair. Je dois donc, en bonne stratégie, faire exactement le contraire de ce que l’on désire que je fasse. En conséquence, j’attendrai le retour de Jacques, et je me posterai de manière à voir la dame mystérieuse. Oh ! oh ! voici une belle chemise de mailles jetée dans ce coin, souple, fine et d’une trempe exquise.

Il la souleva en l’admirant.

— Justement j’en cherchais une, dit-il ; légère comme du lin, trop étroite de beaucoup pour le prieur ; en vérité, on dirait que c’est pour moi que cette chemise a été faite : empruntons-la donc à dom Modeste ; je la lui rendrai à mon retour.

Et Chicot plia prestement la tunique qu’il glissa sous son pourpoint.

Il rattachait la dernière aiguillette quand frère Borromée parut sur le seuil.

— Oh ! oh ! murmura Chicot, encore toi ! mais tu arrives trop tard, l’ami.

Et croisant ses grands bras derrière son dos et se renversant en arrière, Chicot fit comme s’il admirait les trophées.

— Monsieur Robert Briquet cherche quelque arme à sa convenance ? demanda Borromée.

— Moi, cher ami, dit Chicot, et pour quoi faire, mon Dieu, une arme ?

— Dame ! quand on s’en sert si bien.

— Théorie, cher frère, théorie, voilà tout : un pauvre