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mon âme, car c’était non-seulement un ami dévoué, mais encore un assez bon gentilhomme, quoiqu’il n’ait jamais pu voir lui-même dans sa généalogie au delà de son trisaïeul.

« Vous l’entourerez de fleurs, et ferez en sorte qu’il repose au soleil, qu’il aimait beaucoup, étant du midi. Quant à vous, dont j’honore d’autant mieux la tristesse que je la partage, vous quitterez, ainsi que vous m’en témoignez le désir, votre prieuré de Beaune. J’ai trop besoin à Paris d’hommes dévoués et bons clercs pour vous tenir éloigné. En conséquence, je vous nomme prieur des Jacobins, votre résidence étant fixée près la porte Saint-Antoine, à Paris, quartier que notre pauvre ami affectionnait tout particulièrement.

« Votre affectionné Henri, qui vous prie de ne pas l’oublier dans vos saintes prières. »

Qu’on juge si un pareil autographe, sorti tout entier d’une main royale, fit ouvrir de grands yeux au prieur, s’il admira la puissance du génie de Chicot, et s’il se hâta de prendre son vol vers les honneurs qui l’attendaient.

Car l’ambition avait poussé autrefois déjà, on se le rappelle, un de ses tenaces surgeons dans le cœur de Gorenflot, dont le prénom avait toujours été Modeste, et qui, depuis déjà qu’il était prieur de Beaune, s’appelait dom Modeste Gorenflot.

Tout s’était passé à la fois selon les désirs du roi et de Chicot.

Un fagot d’épines, destiné à représenter physiquement et allégoriquement le cadavre, avait été enterré au soleil, au milieu des fleurs, sous un beau cep de vigne ; puis, une fois mort et enterré en effigie, Chicot avait aidé Gorenflot à faire son déménagement.