Page:Dumas - Les Frères Corses, 1881.djvu/97

Cette page a été validée par deux contributeurs.
85
LES FRÈRES CORSES

votre famille ; prenez donc cette lettre, que j’eusse laissée chez vous hier si je n’eusse promis à madame de Franchi de vous la remettre à vous-même.

— Et vous avez quitté tout le monde bien portant ?

— Oui, mais dans l’inquiétude.

— Sur moi ?

— Sur vous. Mais lisez cette lettre, je vous prie.

— Vous permettez ?

— Comment donc !…

M. de Franchi décacheta la lettre, tandis que je préparais des cigarettes.

Cependant je le suivais des yeux pendant que son regard parcourait rapidement l’épître fraternelle ; de temps en temps, il souriait en murmurant :

— Ce cher Lucien ! cette bonne mère !… Oui… oui… je comprends…

Je n’étais pas encore revenu de cette étrange ressemblance ; cependant, comme me l’avait dit Lucien, je remarquais plus de blancheur dans le teint et une prononciation plus nette de la langue française.

— Eh bien, repris-je lorsqu’il eut fini, en lui présentant une cigarette qu’il alluma à la mienne ; vous l’avez vu, comme je vous l’ai dit, votre famille était inquiète, et je vois avec bonheur que c’était à tort.

— Non, me dit-il avec tristesse, pas tout à fait. Je n’ai point été malade, il est vrai ; mais j’ai eu un chagrin, assez violent même, lequel, je vous l’avoue, s’aug-