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LES FRÈRES CORSES

d’avoir deviné le caractère de Louis comme j’eusse deviné celui de Lucien.

Je me déshabillai donc lentement, et, après avoir pris les Orientales de Victor Hugo dans la bibliothèque du futur avocat, je me mis au lit, plein de la satisfaction de moi-même.

Je venais de relire pour la centième fois le Feu du ciel lorsque j’entendis des pas qui montaient l’escalier et qui s’arrêtaient tout doucement à ma porte ; je me doutai que c’était mon hôte qui venait avec l’intention de me souhaiter le bonsoir, mais qui, craignant sans doute que je ne fusse déjà endormi, hésitait à ouvrir la porte.

— Entrez, dis-je en posant mon livre sur la table de nuit.

Effectivement, la porte s’ouvrit et Lucien parut.

— Excusez, me dit-il, mais il me semble, en y réfléchissant, que j’ai été si maussade ce soir, que je n’ai pas voulu me coucher sans vous faire mes excuses ; je viens donc faire amende honorable, et, comme vous paraissez encore avoir bon nombre de questions à me faire, me mettre à votre entière disposition.

— Merci cent fois, lui dis-je ; grâce à votre obligeance, au contraire, je suis à peu près édifié sur tout ce que je voulais savoir, et il ne me reste à apprendre qu’une chose que je me suis promis de ne pas vous demander.

— Pourquoi ?