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LES FRÈRES CORSES

a été donné à un Napoléon de Franchi par Sampietro lui-même.

— Et savez-vous à quelle occasion ?

— Oui. Sampietro et mon aïeul tombèrent dans une embuscade génoise et se défendirent comme des lions ; le casque de Sampietro se détacha, et un Génois à cheval allait le frapper de sa masse, lorsque mon ancêtre lui enfonça son poignard au défaut de la cuirasse ; le cavalier, se sentant blessé, piqua son cheval et s’enfuit emportant le poignard de Napoleone, si profondément enfoncé dans la blessure, que celui-ci ne put l’en arracher ; or, comme mon aïeul tenait, à ce qu’il paraît, à ce poignard, et qu’il regrettait de l’avoir perdu, Sampietro lui donna le sien. Napoleone n’y perdit point, car celui-ci est de fabrique espagnole, comme vous pouvez voir, et perce deux pièces de cinq francs superposées.

— Puis-je tenter l’essai ?

— Parfaitement.

Je mis deux pièces de cinq francs sur le parquet et je frappai un coup vigoureux et sec.

Lucien ne m’avait pas trompé.

Lorsque je relevai le poignard, les deux pièces étaient fixées à la pointe, percées de part en part.

— Allons, allons, dis-je, c’est bien le poignard de Sampietro. Ce qui m’étonne seulement, c’est qu’ayant une pareille arme, il se soit servi d’une corde pour tuer sa femme.