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OTHON L’ARCHER

« — Qu’importe votre nom ? qu’importe d’où vous venez ? qu’importe qui vous a dit que j’étais en péril ? J’abandonne le passé pour l’avenir. Votre nom, c’est le chevalier du Cygne. Vous veniez d’une terre bénie, et c’est Dieu qui vous envoyait. Qu’ai-je besoin de rien savoir de plus ? Voici ma main.

« Le chevalier la baisa avec transport, et, un mois après, le chapelain les unissait dans ce même oratoire où Béatrix, dans la crainte d’un autre mariage, avait, pendant une année et un jour, tant prié et tant pleuré.

« Le ciel bénit cette union : en trois ans, Béatrix rendit le chevalier père de trois fils, qui furent nommés Robert, Godefroy et Rodolphe. Puis trois ans s’écoulèrent encore dans l’union la plus parfaite, et dans un bonheur qui semblait appartenir à un autre monde que celui-ci.

« — Ma mère, dit, un jour, le jeune Robert en rentrant au château, dis-moi donc le nom de mon père.

— Et pourquoi cela ? répondit la mère en tressaillant.

« — Parce que le fils du baron d’Asperen me le demande.

« — Ton père s’appelle le chevalier du Cygne, dit Béatrix, et n’a point d’autre nom.

« L’enfant se contenta de cette réponse et retourna jouer avec ses jeunes amis. Une année s’écoula encore, non plus dans les transports de bonheur qui avaient