jeune maître, répondit le prince, qui commençait à trouver étrange une pareille obstination de la part d’un homme du peuple. Mais prends garde que cela ne te serve pas à grand’chose, et que le premier seigneur sur les terres duquel tu passeras n’exige le même sacrifice sans t’offrir le même dédommagement.
— Pour tout autre que vous, monseigneur, répondit Othon en souriant avec une expression de dédain qui étonna le prince et fit trembler Héléna, ce serait chose facile à entreprendre, mais difficile à mener à bien. Je suis archer, et, continua-t-il en posant les mains sur ses flèches, je porte, comme Votre Seigneurie peut le voir, la vie de douze hommes à ma ceinture.
— Les portes du château sont ouvertes, répondit le comte, reste ou pars, à ta volonté. Je n’ai rien à changer à l’ordre que j’ai donné ; décide-toi librement. Tu sais les conditions à cette heure, et tu ne pourras pas dire que j’ai surpris ton engagement.
— Je suis décidé, monseigneur, répondit Othon en s’inclinant avec un respect mêlé de dignité, et en prononçant ces paroles avec un accent qui prouvait qu’en effet sa résolution était prise.
— Tu pars ? dit le prince.
Othon ouvrit la bouche pour répondre ; mais, avant de prononcer les mots qui devaient le séparer pour jamais d’Héléna, il voulut jeter un dernier regard sur elle ; une larme tremblait dans les yeux de la jeune fille.