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OTHON L’ARCHER

son épée, et vint à lui d’un pas lent et automatique, comme s’il marchait à l’aide de ressorts habilement combinés et non de muscles vivants.

Othon le regarda venir avec un effroi dont il n’était pas le maître. Il n’en songeait pas moins à se mettre en défense, et à soutenir le combat, quel que fût l’adversaire. Cependant, voyant à quel étrange ennemi il avait affaire, il comprit qu’il n’aurait pas trop pour se défendre des armes spirituelles et temporelles ; en conséquence, avant de tirer son épée, il fit le signe de la croix.

Au même moment, les flambeaux s’éteignirent, la table disparut, et le vieux chevalier et son épouse s’évanouirent comme des visions.

Othon resta un moment comme étourdi ; puis, ne voyant et n’entendant plus rien, il entra dans la salle, tout à l’heure si pleine de lumières et maintenant si sombre, et, à la lueur de sa torche de résine, il vit que les convives fantastiques avaient repris leur place dans leurs cadres ; les yeux seuls du vieux chevalier semblaient vivants encore et suivaient Othon en le menaçant.

Othon continua sa route. D’après ce qu’il avait entendu, il jugeait qu’un danger pressant menaçait Hermann, et, voyant une porte ouverte, il suivit l’indication donnée et entra dans le corridor. Arrivé au bout du passage, il atteignit l’escalier, descendit les premières marches, et bientôt se trouva de plain-pied avec le