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OTHON L’ARCHER

— Je suis seule.

— Et vos parents ?

La jeune fille lui montra du doigt deux portraits suspendus à la muraille, l’un d’homme, l’autre de femme, et dit à voix basse :

— Je suis la dernière de la famille.

Hermann la regarda, sans savoir encore que penser de l’être étrange qu’il avait devant lui.

En ce moment ses yeux rencontrèrent les yeux de la jeune fille qui étaient humides de tendresse. Hermann ne songeait plus à la faim ni à la soif ; il voyait devant lui, pauvre archer, une noble dame, oubliant sa naissance et sa fierté pour le recevoir à sa table ; il était jeune, il était beau, il ne manquait pas de confiance en lui-même ; il crut que cette heure qui se présente, dit-on, à tout homme de faire fortune une fois dans sa vie se présentait à lui dans ce moment.

— Mangez donc, lui dit la jeune fille en lui servant un morceau de la hure d’un sanglier. Buvez donc, dit la jeune fille en lui versant un verre de vin vermeil comme du sang.

— Comment vous nommez-vous, ma belle hôtesse ? dit Hermann enhardi et levant son verre.

— Je me nomme Bertha.

— Eh bien ! à votre santé, belle Bertha ! continua l’archer.

Et il but le vin d’un seul trait.