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OTHON L’ARCHER

soin de l’exciter ni de la parole ni de l’éperon, il redoubla d’ardeur, si bien qu’au bout d’un instant ils laissèrent dans l’ombre, à leur gauche, le petit village de Godesberg, perdu dans un massif d’arbres, et, quittant le chemin qui conduit de Rolandseck à Bone, en prenant une seconde fois à gauche, ils s’avancèrent directement vers le château situé au haut d’une colline, et qui porte le même nom que la ville, soit qu’il l’ait reçu d’elle, soit qu’il le lui ait donné.

Il était dès-lors évident que le château de Godesberg était le but de la route du comte Karl ; mais ce qui était plus sûr encore, c’est qu’il allait arriver au lieu de sa destination au milieu d’une fête. À mesure qu’il gravissait le chemin en spirale qui partait du bas de la montagne et aboutissait à la grande porte, il voyait chaque façade à son tour jeter de la lumière par toutes ses fenêtres ; puis, derrière les tentures chaudement éclairées, se mouvoir des ombres nombreuses dessinant des groupes variés. Il n’en continua pas moins sa route, quoiqu’il eût été facile de juger, au léger froncement de ses sourcils, qu’il eût préféré tomber au milieu de l’intimité de la famille que dans le tumulte d’un bal, de sorte que, quelques minutes après, il franchissait la porte du château.

La cour était pleine d’écuyers, de valets, de chevaux et de litières ; car, ainsi que nous l’avons dit, il y avait fête à Godesberg. Aussi à peine le comte Karl eut-il