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LES FRÈRES CORSES

de chance de confortable, et je m’arrêtai à une maison carrée, bâtie en manière de forteresse, avec machicoulis en avant des fenêtres et au-dessus de la porte.

C’était la première fois que je voyais ces fortifications domestiques ; mais aussi il faut dire que la province de Sartène est la terre classique de la vendetta.

— Ah ! bon, me dit le guide suivant des yeux l’indication de ma main, nous allons chez madame Savilia de Franchi. Allons, allons, Votre Seigneurie n’a pas fait un mauvais choix, et l’on voit qu’elle ne manque pas d’expérience.

N’oublions pas de dire que, dans ce quatre-vingt-sixième département de la France, on parle constamment italien.

— Mais, demandai-je, n’y a-t-il pas d’inconvénient à ce que j’aille demander l’hospitalité à une femme ? car, si j’ai bien compris, cette maison appartient à une femme.

— Sans doute, reprit-il d’un air étonné ; mais quel inconvénient Votre Seigneurie veut-elle qu’il y ait à cela ?

— Si cette femme est jeune, repris-je, mû par un sentiment de convenance, ou peut-être, disons le mot, d’amour-propre parisien, une nuit passée sous son toit ne peut-elle pas la compromettre ?

— La compromettre ? répéta le guide cherchant évidemment le sens de ce mot que j’avais italianisé, avec