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LES FRÈRES CORSES

Aussitôt nous nous enfonçâmes dans le bois sans prononcer une seule parole : chacun, à peine remis de la scène dont nous allions revoir le théâtre, sentait que quelque chose de non moins terrible allait se passer.

Nous arrivâmes à la fondrière.

M. de Château-Renaud, grâce à une grande puissance sur lui-même, paraissait calme ; mais ceux qui l’avaient vu dans ces deux rencontres pouvaient cependant apprécier la différence.

De temps en temps, il jetait à la dérobée un regard sur Lucien, et ce regard exprimait une inquiétude qui ressemblait à de l’effroi.

Peut-être était-ce cette grande ressemblance des deux frères qui le préoccupait, et croyait-il voir dans Lucien l’ombre vengeresse de Louis.

Pendant qu’on chargeait les pistolets, je le vis enfin tirer sa main de sa redingote ; sa main était enveloppée d’un mouchoir mouillé qui devait en apaiser les mouvements fébriles.

Lucien attendait l’œil calme et fixe, en homme qui est sûr de sa vengeance.

Sans qu’on lui indiquât sa place, Lucien alla prendre celle qu’occupait son frère ; ce qui força naturellement M. de Château-Renaud à se diriger vers celle qu’il avait déjà occupée.

Lucien reçut son arme avec un sourire de joie,

M. de Château-Renaud, en prenant la sienne, de