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LES FRÈRES CORSES

il s’inclina vers le sol et, voyant sur la terre une place rougeâtre :

— C’est ici, dit-il.

Alors il baissa lentement la tête et baisa des lèvres le gazon.

Puis, se relevant l’œil en flamme, et traversant toute la profondeur de la fondrière pour atteindre la place d’où avait tiré M. de Château-Renaud :

— C’est ici qu’il était, dit-il en frappant du pied ; c’est ici que vous le verrez couché demain.

— Comment, lui dis-je, demain ?

— Oui ; ou il est un lâche, ou, demain, il me donnera ici ma revanche.

— Mais, mon cher Lucien, lui dis-je, l’habitude en France, vous le savez, est qu’un duel n’entraîne pas d’autres suites que les suites naturelles de ce duel. M. de Château-Renaud s’est battu avec votre frère, qu’il avait provoqué, mais il n’a rien à faire avec vous.

— Ah ! vraiment, M. de Château-Renaud a eu le droit de provoquer mon frère, parce que mon frère offrait son appui à une femme qu’il avait, lui, lâchement trompée, et selon vous, il avait le droit de provoquer mon frère. M. de Château-Renaud a tué mon frère, qui n’avait jamais touché un pistolet ; il l’a tué avec autant de sécurité que s’il avait tiré sur ce chevreuil qui nous regarde, et moi, moi, je n’aurais pas le droit de provoquer M. de Château-Renaud ? Allons donc !