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Mon ami, mon seul ami, parlez ! — Page 584.

— Avant de dire : « On en parle, mon ami, » sachez d’abord de quoi l’on peut parler. Il ne s’agit, je vous jure, de rien qui ne soit au fond très-innocent ; peut-être une promenade…

— Ah ! une promenade avec le roi ?

— Mais oui, avec le roi ; il me semble que le roi s’est promené déjà bien souvent avec des dames, sans que pour cela…

— Vous ne m’eussiez pas écrit, répéterai-je, si cette promenade était bien naturelle.

— Je sais que, pendant cet orage, il faisait meilleur pour le roi de se mettre à l’abri que de rester debout tête nue devant La Vallière ; mais…

— Mais ?…

— Le roi est si poli !

— Oh ! de Guiche, de Guiche, vous me faites mourir !

— Taisons-nous donc.

— Non, continuez. Cette promenade a été suivie d’autres ?

— Non, c’est-à-dire, oui ; il y a eu l’aventure du chêne. Est-ce cela ? Je n’en sais rien.

Raoul se leva. De Guiche essaya de l’imiter malgré sa faiblesse.

— Voyez-vous, dit-il, je n’ajouterai pas un mot ; j’en ai trop ou trop peu dit. D’autres vous renseigneront s’ils veulent ou s’ils peuvent : mon office était de vous avertir, je l’ai fait. Surveillez à présent vos affaires vous-même.

— Questionner ? Hélas ! vous n’êtes pas mon ami, vous qui me parlez ainsi, dit le jeune homme désolé. Le premier que je questionnerai sera un méchant ou un sot ; méchant, il me mentira pour me tourmenter ; sot, il fera pis encore. Ah ! de Guiche ! de Guiche ! avant deux