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m’accorderiez ce service en échange de quoi ? Voyons, donnant, donnant, n’est-ce pas ?

– Oui. Chaque fois donc que tu formeras un vœu, et que ce vœu ne profitera pas à toi-même, je veux avoir en propriété une petite partie de ta personne.

– Eh ! eh ! fit Thibault en reculant tout effrayé.

– Oh ! sois tranquille, je ne te demande pas une livre de ta chair, comme certain juif de ma connaissance a fait pour son débiteur.

– Que me demandez-vous, alors ?

– Un de tes cheveux au premier vœu que tu feras, deux au second, quatre au troisième, et ainsi de suite en doublant toujours.

Thibault se mit à rire.

– Si ce n’est que cela, messire loup, dit-il, j’accepte, et je vais tâcher de souhaiter une si bonne chose du premier coup, que je ne serai jamais forcé de porter perruque. Topons donc !

Et Thibault tendit la main. Le loup noir leva la patte, mais il laissa la patte levée.

– Eh bien ? fit Thibault.

– Je réfléchis, dit le loup, que j’ai les griffes pointues, et que, sans le vouloir, je pourrais te faire grand mal. Mais je vois un moyen de conclure le marché sans aucun inconvénient. Tu as une bague d’argent ; moi, j’ai une bague d’or ; – troquons. – Tu vois que le marché est à ton avantage.

Et le loup montra sa patte, à l’annulaire de laquelle brillait, en effet, à travers le poil, une bague de l’or le plus fin.

– Ah ! dit Thibault, j’accepte.

L’échange des anneaux se fit.

– Bon ! dit le loup, nous voilà mariés.

– Oh ! fit Thibault, fiancés, messire loup. Peste ! comme vous y allez !