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à la billebaude et attaquait le premier lièvre venu ; car, ainsi que nous l’avons dit, il chassait tous les jours, le digne seigneur, et il se fût plutôt passé de manger et même de boire toute une journée, quoiqu’il eût souvent soif, que de rester vingt-quatre heures sans voir courir ses chiens.

Mais, comme on sait, si vites que soient les chevaux, si fins que soient les chiens, la chasse a ses bons et ses mauvais quarts d’heure.

Un jour, Marcotte se présenta tout penaud au rendez-vous où l’attendait le baron Jean.

– Eh bien, Marcotte, demanda le baron Jean en fronçant le sourcil, qu’y a-t-il encore ? Je vois à ton air que la chasse ira mal aujourd’hui.

Marcotte secoua la tête.

– Voyons, parle, fit le baron Jean avec un geste plein d’impatience.

– Eh bien, il y a, monseigneur, que j’ai eu connaissance du loup noir.

– Ah ! ah ! fit le baron Jean, dont les yeux étincelèrent.

Et, en effet, c’était la cinquième ou sixième fois que le digne seigneur lançait l’animal en question, et que son pelage inaccoutumé rendait si facile à reconnaître, sans jamais être arrivé à le joindre à portée de la carabine ou à le forcer.

– Oui, reprit Marcotte ; mais la damnée bête a si bien employé sa nuit, tellement croisé et rabattu ses voies, qu’après avoir tenu la moitié de la forêt, je me suis retrouvé à ma première brisée.

– Alors, Marcotte, tu crois qu’il n’y a aucune chance de rapprocher l’animal ?

– Je ne crois pas.

– Par tous les diables ! s’écria le seigneur Jean, – qui était le plus grand jureur qui eût paru sur la terre