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Cependant le soin de sa conservation ne l’abandonnait pas ; ses forces n’étaient point diminuées.

Mais, il sentait que s’il fallait que, par mauvaise chance, il rencontrât de nouveaux relais, ses forces pourraient bien s’épuiser.

Il se décida donc à prendre un grand parti pour essayer de distancer les chiens, puis de rentrer dans ses demeures, où, grâce à la connaissance qu’il avait de la forêt, il pouvait espérer de dépasser les chiens.

En conséquence, il fit un second hourvari.

Il remonta vers Puiseux, longea les bordures de Viviers, rentra dans la forêt de Compiègne, fit une pointe dans la forêt de Largue, revint traverser l’Aisne à Attichy, et rentra dans la forêt de Villers-Cotterêts par le fond d’Argent.

Il espérait ainsi déjouer la stratégie avec laquelle le seigneur Jean avait sans doute échelonné sa meute.

Une fois de retour dans ses repaires habituels, Thibault respira plus à l’aise.

Il se retrouvait sur les bords de l’Ourcq, entre Norroy et Trouennes, à l’endroit où la rivière roule profondément encaissée entre une double rangée de rochers ; il s’élança sur une roche aiguë qui surplombait le torrent, du haut de cet escarpement se jeta résolument dans les flots, gagna à la nage une anfractuosité située au soubassement du roc, d’où il venait de se laisser tomber, et, caché un peu au-dessous du niveau ordinaire de l’eau, au fond de cette caverne, il attendit.

Il avait gagné près d’une lieue sur la meute.

Cependant, il était là depuis dix minutes à peine, lorsque la tempête de chiens arriva sur la crête du rocher.

Ceux qui menaient la tête, ivres d’ardeur, ne virent point le gouffre, ou, comme celui qu’ils poursuivaient,