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der le limier, et nous ne rembucherons jamais le loup.

– La faute est évidente, monseigneur, et je ne la nie pas, répondit le piqueur ; mais, l’ayant vu hier au soir traverser une ligne à cent pas d’ici, il m’était impossible de supposer qu’il eût fait sa nuit dans ce triage et que nous l’eussions à vingt pas de nous.

– Es-tu bien sûr que ce soit le même qui nous a déjà échappé tant de fois ?

– Que le pain que je mange au service de monseigneur me serve de poison si ce n’est pas le loup noir que nous chassions l’an passé, quand le pauvre Marcotte se noya.

– Je voudrais bien l’attaquer, dit le seigneur Jean avec un soupir.

– Que monseigneur l’ordonne, et nous attaquerons ; mais qu’il me permette de lui faire observer que nous avons encore devant nous deux bonnes heures de nuit qui nous suffisent pour rompre les jambes de tout ce que nous avons de chevaux.

– Je ne dis pas non ; mais, si nous attendons le jour, l’Éveillé, ce gaillard-là sera à dix lieues d’ici.

– Au moins, monseigneur, dit l’Éveillé en secouant la tête, au moins !

– J’ai ce misérable loup noir dans la cervelle, ajouta le seigneur Jean, et sa peau me fait si grande envie, que si je ne l’ai pas, j’en ferai, bien sûr, une maladie.

– Alors, attaquons, monseigneur, attaquons sans perdre une minute.

– Tu as raison, l’Éveillé ; va quérir les chiens, mon ami.

L’Éveillé reprit son cheval, que, pour faire le bois, il avait attaché à un arbre. Puis il partit au galop.

Au bout de dix minutes, qui parurent dix siècles au baron, l’Éveillé revenait avec tout l’équipage.