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êtes derrière cet enfant là, il n’aurait jamais tant seulement traversé la mer pour venir en France.

– Tu as raison, Mocquet, emmène-le ; je suis folle.

Et ma mère se retourna pour essuyer une larme.

Larme de mère, diamant du cœur, plus précieux qu’une perle d’Ophir.

Je la vis couler.

J’allai à la pauvre femme ; je lui dis tout bas :

– Si tu veux, mère, je resterai.

– Non, va, va, mon enfant, dit-elle ; Mocquet a raison : il faut qu’un jour tu sois un homme.

Je l’embrassai encore une dernière fois.

Puis j’allai rejoindre Mocquet, déjà en chemin.

Au bout de cent pas, je me retournai.

Ma mère s’était avancée jusqu’au milieu de la rue pour me suivre plus longtemps des yeux.

Ce fut mon tour d’essuyer une larme au bord de ma paupière.

– Bon ! me dit Mocquet, voilà que vous pleurez, vous aussi, monsieur Alexandre !

– Allons donc, Mocquet ! c’est de froid.

Vous qui m’aviez donné cette larme, ô mon Dieu, vous savez bien, n’est-ce pas, que ce n’était pas de froid que je pleurais.


VIII


Nous arrivâmes chez Mocquet à la nuit noire.

Nous soupâmes d’une omelette au lard et d’une gibelotte de lapin.

Puis Mocquet me fit mon lit. Il avait tenu parole à