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Ma mère nous regardait à travers les vitres. Elle se doutait bien qu’il se tramait quelque complot.

Nous rentrâmes.

– Ah ! Mocquet, dit-elle, tu n’es guère raisonnable, va !

– En quoi ça, madame la générale ? demanda Mocquet.

– Eh ! de lui monter la tête comme tu fais ; il n’y pense déjà que trop, à ta maudite chasse !

– Dame ! madame la générale, ça, c’est comme les chiens de bonne race : son père était chasseur, il est chasseur, son fils sera chasseur ; faut en prendre votre parti.

– Et s’il lui arrive malheur ?

– Avec moi, malheur ? Malheur avec Mocquet ? Allons donc ! J’en réponds corps pour corps, de M. Alexandre. Lui arriver malheur, à lui, au fils du général ? Mais jamais ! jamais ! au grand jamais !

Ma pauvre mère secoua la tête. J’allai me pendre à son cou.

– Ma petite mère, lui dis-je, je t’en prie.

– Mais tu lui chargeras son fusil, Mocquet ?

– Soyez tranquille ! Soixante grains de poudre, pas un de plus, pas un de moins, et une balle de vingt à la livre.

– Tu ne le quitteras pas ?

– Pas plus que son ombre.

– Tu le placeras près de toi ?

– Entre mes jambes.

– Mocquet ! c’est à toi seul que je le confie.

– Et on vous le rendra intact. Allons, monsieur Alexandre, prenez vos cliques et vos claques, et partons : la générale le permet.

– Comment ! tu l’emmènes ce soir, Mocquet ?

– Bon ! demain, il serait trop tard pour le venir