Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/245

Cette page a été validée par deux contributeurs.


XVIII

mort et résurrection


Le froid du matin rappela Thibault à la vie.

Il essaya de se soulever, mais une vive douleur le clouait à sa place.

Il était couché sur le dos, n’avait nul souvenir ; et ne voyait au-dessus de sa tête qu’un ciel gris et bas.

Il fit un effort, s’appuya sur le côté, se souleva sur son coude et regarda autour de lui.

La vue des objets extérieurs lui rendit la mémoire des événements accomplis.

Il reconnut la brèche du parc.

Il se rappela son entrevue amoureuse avec la comtesse, son duel acharné avec le comte.

À trois pas de lui, la terre était rouge de sang.

Seulement, le comte n’était plus là.

Sans doute Lestocq, qui lui avait donné, à lui, le joli coup de pointe qui le clouait à cette place, avait aidé son maître à rentrer chez lui.

Quant à Thibault, on l’avait laissé là, au risque qu’il y mourût comme un chien.

Le sabotier avait sur le bout de la langue tous les souhaits de désastres que l’on peut jeter à son plus cruel ennemi.

Mais, depuis que Thibault n’était plus Thibault, et pour tout le temps qu’il lui restait à être encore le baron Raoul, ou du moins à se dissimuler, sous son enveloppe, tout son pouvoir fantastique était perdu.