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On pêchait les magnifiques étangs du Berval et de Poudron.

La pêche d’un étang est une grande affaire pour le propriétaire ou le fermier, sans compter que c’est un grand plaisir pour les spectateurs.

Aussi les pêches sont-elles affichées un mois à l’avance, et vient-on à une belle pêche de dix lieues à la ronde.

Et, par ce mot pêche, que ceux de nos lecteurs non habitués aux us et coutumes de la province n’aillent pas croire qu’il s’agit d’une pêche à la ligne avec l’asticot, le ver rouge ou le blé parfumé, ou d’une pêche à la ligne de fond, à l’épervier ou au verveux ; non pas, il s’agit de vider parfois un étang de trois quarts de lieue ou d’une lieue de long, et cela depuis le plus gros brochet jusqu’à la plus petite ablette.

Voici comment la chose se pratique.

Il n’y a, selon toute probabilité, pas un de nos lecteurs qui n’ait vu un étang.

Tout étang a deux issues : celle par laquelle l’eau entre, et celle par laquelle l’eau sort.

Celle par laquelle l’eau entre n’a pas de nom ; celle par laquelle elle sort s’appelle la bonde. C’est à la bonde que se fait la pêche.

L’eau, en sortant de la bonde, tombe dans un vaste réservoir d’où elle s’échappe à travers les mailles d’un vigoureux filet. L’eau sort, mais le poisson reste.

On sait combien de jours il faut pour vider un étang.

On ne convoque donc les curieux et les amateurs que pour le deuxième, troisième ou quatrième jour, selon le volume d’eau que l’étang doit dégorger avant d’arriver au dénouement.

Le dénouement, c’est l’apparition du poisson à la bonde.