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Lorsque Thibault s’éveilla, il faisait grand jour.

Le soleil était aux deux tiers de sa hauteur.

Ses rayons chatoyaient sur les feuilles tremblotantes et jaunissantes du taillis, et les teignaient de mille nuances d’or et de pourpre.

Il courut à la fenêtre.

Les loups avaient disparu.

Seulement, on pouvait compter sur l’herbe humide de rosée les places que leurs corps avaient occupées pendant la nuit.

Le soir, les loups se réunirent encore devant la demeure de Thibault, qui, petit à petit, commençait à se familiariser avec leur présence.

Il en arriva à supposer que ses relations avec le grand loup noir lui avaient concilié quelques sympathies chez la gent de cette espèce, et il résolut de savoir, une fois pour toutes, à quoi s’en tenir sur leurs desseins.

Ayant donc passé à sa ceinture une serpe fraîchement émoulue, ayant pris à la main un bon épieu, le sabotier ouvrit la porte et s’avança résolument vers la troupe.

Mais, à sa grande surprise, au lieu de chercher à s’élancer sur lui, les loups commencèrent à remuer leurs queues comme des chiens qui voient venir leur maître.

Leurs façons amicales furent si expressives, que Thibault en vint à passer la main sur l’échine de l’un d’eux, qui non seulement se laissa faire, mais qui, en outre, donna les marques d’une satisfaction très profonde.

– Oh ! oh ! murmura Thibault, dont l’imagination vagabonde allait toujours au grand galop, si la docilité de ces drôles-là correspond à leur gentillesse, me voilà propriétaire d’une meute comme jamais le seigneur Jean n’en a possédé une, et je suis certain maintenant d’avoir de la venaison chaque fois qu’il m’en prendra fantaisie.