Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/122

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Thibault traversa la cour, s’approcha des bâtiments d’habitation d’un air dégagé, se nomma, et expliqua à la meunière comment le désir de visiter Landry, son unique parent, l’avait décidé à se présenter chez elle.

La meunière se montra fort courtoise.

Elle engagea le nouveau venu à passer la journée au moulin, avec un sourire que celui-ci trouva du meilleur augure.

Thibault venait avec son cadeau.

Tout en traversant la forêt, il avait décroché quelques grives qu’il avait trouvées pendues à des collets amorcés de sorbiers.

La meunière les donna à plumer à l’instant même, en disant qu’elle espérait bien que Thibault en mangerait sa part.

Cependant Thibault remarqua que, tout en causant avec lui, la belle meunière semblait chercher des distractions par-dessus son épaule.

Il se retourna vivement, et reconnut que l’objet de la préoccupation de la belle meunière, c’était Landry, qui déchargeait les deux ânes.

Madame Polet, voyant que sa préoccupation n’avait pas échappé à Thibault, devint rouge comme une cerise.

Puis, se remettant aussitôt :

– Monsieur Thibault, dit-elle à sa nouvelle connaissance, il serait charitable à vous qui paraissez si vigoureux, d’assister votre cousin ; vous voyez bien qu’un tel ouvrage est trop fort pour lui tout seul.

Et elle rentra dans la maison.

– Diable ! diable ! fit Thibault en suivant la meunière du regard et en reportant ensuite les yeux sur Landry, ce gaillard-là serait-il plus heureux qu’il ne s’en doute lui-même, et faudra-t-il que, pour me débarrasser de lui, j’appelle le loup noir à mon aide ?