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que tu espères m’en cacher la cause, quand rien n’est plus facile que de la deviner.

– Alors, devine.

– Eh bien, tu es amoureux, pardieu ! Ce n’est pas plus difficile que cela.

– Moi, amoureux ! s’écria Landry. Et qui est-ce qui t’a fait ce mensonge-là ?

– Ce n’est pas un mensonge, c’est une vérité.

Landry poussa un second soupir plus gros encore de désespoir que le premier.

– Eh bien, oui ! dit-il, là ! c’est vrai, je suis amoureux !

– Ah ! c’est bien heureux ! voilà le grand mot lâché ! dit Thibault avec un certain battement de cœur, car il pressentait un rival dans son cousin. Et de qui es-tu amoureux, Landry ?

– De qui je suis amoureux ?

– Oui, je te le demande.

– Quant à cela, cousin Thibault, tu m’arracheras plutôt le cœur de la poitrine que de me le faire dire.

– Tu me l’as dit.

– Comment ! je te l’ai dit ? s’écria Landry en fixant sur le sabotier des yeux stupéfaits.

– Sans doute.

– Ah ! par exemple !

– N’as-tu pas dit que mieux eût valu que tu tombasses sous la roue du moulin, le jour où tu es venu demander du service à la Polet, que d’être accepté par elle comme premier garçon ? Tu es malheureux dans le moulin, tu es amoureux ; donc, c’est de la meunière que tu es amoureux, et c’est cet amour qui cause ton malheur.

– Ah ! tais-toi donc, Thibault ! Si elle nous entendait !…

– Bon ! et comment pourrait-elle nous entendre ?