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les nuages que M. de Villefort avait vus le matin rayer le soleil levant s’étaient dissipés comme par magie, et laissaient luire dans toute sa pureté un des derniers, un des plus doux jours de septembre.

Beauchamp, un des rois de la presse, et par conséquent ayant son trône partout, lorgnait à droite et à gauche. Il aperçut Château-Renaud et Debray qui venaient de gagner les bonnes grâces d’un sergent de ville, et qui l’avaient décidé à se mettre derrière eux au lieu de les masquer, comme c’était son droit. Le digne agent avait flairé le secrétaire du ministre et le millionnaire ; il se montra plein d’égards pour ses nobles voisins et leur permit même d’aller rendre visite à Beauchamp, en leur promettant de leur garder leurs places.

— Eh bien ! dit Beauchamp, nous venons donc voir notre ami ?

— Eh ! mon Dieu, oui, répondit Debray : ce digne prince ! Que le diable soit des princes italiens, va !

— Un homme qui avait eu Dante pour généalogiste, et qui remontait à la Divine Comédie !

— Noblesse de corde, dit flegmatiquement Château-Renaud.

— Il sera condamné, n’est-ce pas ? demanda Debray à Beauchamp.

— Eh ! mon cher, répondit le journaliste, c’est à vous, ce me semble, qu’il faut demander cela : vous connaissez mieux que nous autres l’air du bureau ; avez-vous vu le président à la dernière soirée de votre ministre ?

— Oui.

— Que vous a-t-il dit ?

— Une chose qui va vous étonner.

— Ah ! parlez donc vite, alors, cher ami, il y a si longtemps qu’on ne me dit plus rien de ce genre-là.