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— Pourquoi cela ? dit Andrea.

— Comment ! tu prends une livrée, tu te déguises en domestique, et tu gardes à ton doigt un diamant de quatre à cinq mille francs !

— Peste ! tu estimes juste ! Pourquoi ne te fais-tu pas commissaire-priseur ?

— C’est que je m’y connais en diamants ; j’en ai eu.

— Je te conseille de t’en vanter, dit Andrea, qui, sans se courroucer, comme le craignait Caderousse, de cette nouvelle extorsion, livra complaisamment la bague.

Caderousse le regarda de si près qu’il fut clair pour Andrea qu’il examinait si les arêtes de la coupe étaient bien vives.

— C’est un faux diamant, dit Caderousse.

— Allons donc, fit Andrea, plaisantes-tu ?

— Oh ! ne te fâche pas, on peut voir.

Et Caderousse alla à la fenêtre, fit glisser le diamant sur le carreau.

On entendit crier la vitre.

Confiteor ! dit Caderousse en passant le diamant à son petit doigt, je me trompais ; mais ces voleurs de joailliers imitent si bien les pierres, qu’on n’ose plus aller voler dans les boutiques de bijouterie ; c’est encore une branche d’industrie paralysée.

— Eh bien ! dit Andrea, est-ce fini ? as-tu encore quelque chose à me demander ? te faut-il ma veste ? veux-tu ma casquette ? Ne te gêne pas pendant que tu y es.

— Non, tu es un bon compagnon au fond. Je ne te retiens plus, et je tâcherai de me guérir de mon ambition.

— Mais prends garde qu’en vendant ce diamant il ne t’arrive ce que tu craignais qu’il t’arrivât pour l’or.

— Je ne le vendrai pas, sois tranquille.

— Non, pas d’ici à après-demain, du moins, pensa le jeune homme.