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III

L’ACCUSATION.

M. d’Avrigny eut bientôt rappelé à lui le magistrat, qui semblait un second cadavre dans cette chambre funèbre.

— Oh ! la mort est dans ma maison ! s’écria Villefort.

— Dites le crime, répondit le docteur.

— Monsieur d’Avrigny ! s’écria Villefort, je ne puis vous exprimer tout ce qui se passe en moi en ce moment : c’est de l’effroi, c’est de la douleur, c’est de la folie.

— Oui, dit M. d’Avrigny avec un calme imposant : mais je crois qu’il est temps que nous agissions ; je crois qu’il est temps que nous opposions une digue à ce torrent de mortalité. Quant à moi, je ne me sens point capable de porter plus longtemps de pareils secrets, sans espoir d’en faire bientôt sortir la vengeance pour la société et les victimes.

Villefort jeta autour de lui un sombre regard.

— Dans ma maison ! murmura-t-il ! dans ma maison !

— Voyons, magistrat, dit d’Avrigny, soyez homme ; interprète de la loi, honorez-vous par une immolation complète.

— Vous me faites frémir, docteur, une immolation !

— J’ai dit le mot.

— Vous soupçonnez donc quelqu’un ?

— Je ne soupçonne personne ; la mort frappe à votre porte, elle entre, elle va, non pas aveugle, mais intelligente qu’elle est, de chambre en chambre. Eh bien ! moi,