— Aux Champs-Élysées, dit le général, chez le comte de Monte-Cristo. Vite !
Les chevaux bondirent sous le coup de fouet qui les enveloppa ; cinq minutes après, ils s’arrêtèrent devant la maison du comte.
M. de Morcerf ouvrit lui-même la portière, et, la voiture roulant encore, il sauta comme un jeune homme dans la contre-allée, sonna et disparut dans la porte béante avec son domestique.
Une seconde après, Baptistin annonçait à M. de Monte-Cristo le comte de Morcerf, et Monte-Cristo, reconduisant Haydée, donna l’ordre qu’on fît entrer le comte de Morcerf dans le salon.
Le général arpentait pour la troisième fois le salon dans toute sa longueur, lorsqu’en se retournant il aperçut Monte-Cristo debout sur le seuil.
— Eh ! c’est M. de Morcerf, dit tranquillement Monte-Cristo ; je croyais avoir mal entendu.
— Oui, c’est moi-même, dit le comte avec une effroyable contraction des lèvres qui l’empêchait d’articuler nettement.
— Il ne me reste donc qu’à savoir maintenant, dit Monte-Cristo, la cause qui me procure le plaisir de voir monsieur le comte de Morcerf de si bonne heure.
— Vous avez eu ce matin une rencontre avec mon fils, monsieur ? dit le général.
— Vous savez cela ? répondit le comte.
— Et je sais aussi que mon fils avait de bonnes raisons pour désirer se battre contre vous et faire tout ce qu’il pourrait pour vous tuer.
— En effet, monsieur, il en avait de fort bonnes ! mais vous voyez que, malgré ces raisons-là, il ne m’a pas tué et, même qu’il ne s’est pas battu.