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qu’avez-vous donc ? serait-ce par hasard la chaleur de ce salon qui vous fait mal ?

— Souffrez-vous, ma mère ? s’écria le vicomte en s’élançant au-devant de Mercédès. Elle les remercia tous deux avec un sourire.

— Non, dit-elle, mais j’ai éprouvé quelque émotion en voyant pour la première fois celui sans l’intervention duquel nous serions en ce moment dans les larmes et dans le deuil. Monsieur, continua la comtesse en s’avançant avec la majesté d’une reine, je vous dois la vie de mon fils, et pour ce bienfait je vous bénis. Maintenant je vous rends grâce pour le plaisir que vous me faites en me procurant l’occasion de vous remercier comme je vous ai béni, c’est-à-dire du fond du cœur.

Le comte s’inclina encore, mais plus profondément que la première fois ; il était plus pâle encore que Mercédès.

— Madame, dit-il, M. le comte et vous me récompensez trop généreusement d’une action bien simple. Sauver un homme, épargner un tourment à un père, ménager la sensibilité d’une femme, ce n’est point faire une bonne œuvre, c’est faire acte d’humanité.

À ces mots, prononcés avec une douceur et une politesse exquises, Mme de Morcerf répondit avec un accent profond :

— Il est bien heureux pour mon fils, monsieur, de vous avoir pour ami, et je remercie Dieu qui a fait les choses ainsi.

Et Mercédès leva ses beaux yeux au ciel avec une gratitude si infinie, que le comte crut y voir trembler deux larmes.

M. de Morcerf s’approcha d’elle.

— Madame, dit-il, j’ai déjà fait mes excuses à monsieur