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mangé du hatchis ; de sorte qu’il se pourrait bien que ce qu’il a pris pour des femmes fût tout bonnement un quadrille de statues.

Les jeunes gens regardèrent Morcerf d’un œil qui voulait dire :

— Ah çà, mon cher, devenez-vous insensé, ou vous moquez-vous de nous ?

— En effet, dit Morrel pensif, j’ai entendu raconter encore par un vieux marin nommé Penelon quelque chose de pareil à ce que dit là M. de Morcerf.

— Ah ! fit Albert, c’est bien heureux que M. Morrel me vienne en aide. Cela vous contrarie, n’est-ce pas, qu’il jette ainsi un peloton de fil dans mon labyrinthe ?

— Pardon, cher ami, dit Debray, c’est que vous nous racontez des choses si invraisemblables…

— Ah parbleu ! parce que vos ambassadeurs, vos consuls ne vous en parlent pas ! Ils n’ont pas le temps, il faut bien qu’ils molestent leurs compatriotes qui voyagent.

— Ah ! bon, voilà que vous vous fâchez, et que vous tombez sur nos pauvres agents. Eh ! mon Dieu ! avec quoi voulez-vous qu’ils vous protègent ? la Chambre leur rogne tous les jours leurs appointements ; c’est au point qu’on n’en trouve plus. Voulez-vous être ambassadeur, Albert ? je vous fais nommer à Constantinople.

— Non pas ! pour que le sultan, à la première démonstration que je ferai en faveur de Méhémet-Ali, m’envoie le cordon et que mes secrétaires m’étranglent.

— Vous voyez bien, dit Debray.

— Oui, mais tout cela n’empêche pas mon comte de Monte-Cristo d’exister !

— Pardieu ! tout le monde existe, le beau miracle !

— Tout le monde existe, sans doute, mais pas dans