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— Et monsieur le comte de Monte-Cristo, roi de la Chine, empereur de la Cochinchine, dit le jeune drôle en lançant un regard sournois à sa sœur.

Pour cette fois, madame de Villefort pâlit, et faillit s’irriter contre ce fléau domestique qui répondait au nom d’Édouard ; mais, tout au contraire, le comte sourit et parut regarder l’enfant avec complaisance, ce qui porta au comble la joie et l’enthousiasme de sa mère.

— Mais, madame, reprit le comte en renouant la conversation et en regardant tour à tour madame de Villefort et Valentine, est-ce que je n’ai pas déjà eu l’honneur de vous voir quelque part, vous et mademoiselle ? Tout à l’heure j’y songeais déjà ; et quand mademoiselle est entrée, sa vue a été une lueur de plus jetée sur un souvenir confus, pardonnez-moi ce mot.

— Cela n’est pas probable, monsieur ; mademoiselle de Villefort aime peu le monde, et nous sortons rarement, dit la jeune femme.

— Aussi n’est-ce point dans le monde que j’ai vu mademoiselle, ainsi que vous, madame, ainsi que ce charmant espiègle. Le monde parisien, d’ailleurs, m’est absolument inconnu, car, je crois avoir eu l’honneur de vous le dire, je suis à Paris depuis quelques jours. Non, si vous permettez que je me rappelle… attendez…

Le comte mit sa main sur son front comme pour concentrer tous ses souvenirs :

— Non, c’est au-dehors… c’est… je ne sais pas… mais il me semble que ce souvenir est inséparable d’un beau soleil et d’une espèce de fête religieuse… Mademoiselle tenait des fleurs à la main ; l’enfant courait après un beau paon dans un jardin, et vous, madame, vous étiez sous une treille en berceau… Aidez-moi donc, madame ; est-ce que les choses que je vous dis là ne vous rappellent rien ?