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— Dans huit jours, vous ne serez plus à Beaucaire, dit Caderousse, puisque la foire finit la semaine prochaine.

— Non, mais cela ne fait rien ; écrivez-moi à Paris, à M. Joannès, au Palais-Royal, galerie de Pierre, no 45, je ferai le voyage exprès si cela en vaut la peine.

Un coup de tonnerre retentit, accompagné d’un éclair si violent qu’il effaça presque la clarté de la lampe.

— Oh ! oh ! dit Caderousse, vous allez partir par ce temps-là ?

— Oh ! je n’ai pas peur du tonnerre, dit le bijoutier.

— Et des voleurs ? demanda la Carconte. La route n’est jamais bien sûre pendant la foire.

— Oh ! quant aux voleurs, dit Joannès, voilà pour eux.

Et il tira de sa poche une paire de petits pistolets chargés jusqu’à la gueule.

— Voici, dit-il, des chiens qui aboient et mordent en même temps : c’est pour les deux premiers qui auraient envie de votre diamant, père Caderousse.

Caderousse et sa femme échangèrent un regard sombre. Il paraît qu’ils avaient en même temps quelque terrible pensée.

— Alors, bon voyage ! dit Caderousse.

— Merci ! dit le bijoutier.

Il prit sa canne qu’il avait posée contre un vieux bahut, et sortit. Au moment où il ouvrit la porte, une telle bouffée de vent entra qu’elle faillit éteindre la lampe.

— Oh ! dit-il, il va faire un joli temps, et deux lieues de pays à faire avec ce temps-là !

— Restez, dit Caderousse, vous coucherez ici.

— Oui, restez, dit la Carconte d’une voix tremblante, nous aurons bien soin de vous.

— Non pas, il faut que j’aille coucher à Beaucaire. Adieu.