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ménagés à notre intention, afin que de là nous pussions guetter le moment opportun de faire reconnaître que nous étions dans le voisinage. Je comptais, si Caderousse était seul, le prévenir de mon arrivée, achever chez lui le repas interrompu par l’apparition des douaniers, et profiter de l’orage qui se préparait pour regagner les bords du Rhône et m’assurer de ce qu’étaient devenus la barque et ceux qui la montaient. Je me glissai donc dans la soupente et bien m’en prit, car à ce moment même Caderousse rentrait chez lui avec un inconnu.

Je me tins coi et j’attendis, non point dans l’intention de surprendre les secrets de mon hôte, mais parce que je ne pouvais faire autrement ; d’ailleurs, dix fois même chose était déjà arrivée.

L’homme qui accompagnait Caderousse était évidemment étranger au Midi de la France : c’était un de ces négociants forains qui viennent vendre des bijoux à la foire de Beaucaire et qui, pendant un mois que dure cette foire, où affluent des marchands et des acquéreurs de toutes les parties de l’Europe, font quelquefois pour cent ou cent cinquante mille francs d’affaires.

Caderousse entra vivement et le premier.

Puis voyant la salle d’en bas vide comme d’habitude et simplement gardée par son chien, il appela sa femme.

— Hé ! la Carconte, dit-il, ce digne homme de prêtre ne nous avait pas trompés ; le diamant était bon.

Une exclamation joyeuse se fit entendre, et presque aussitôt l’escalier craqua sous un pas alourdi par la faiblesse et la maladie.

— Qu’est-ce que tu dis ? demanda la femme plus pâle qu’une morte.

— Je dis que le diamant était bon, que voilà monsieur, un des premiers bijoutiers de Paris, qui est prêt à nous