Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/288

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— C’est-à-dire, quand vous dites invisible, mon cher Franz, dit Albert, c’est tout bonnement pour faire du mystérieux. Pour qui prenez-vous donc ce domino bleu qui était à la fenêtre tendue de damas blanc ?

— Et où était cette fenêtre tendue de damas blanc ? demanda la comtesse.

— Au palais Rospoli.

— Le comte avait donc trois fenêtres au palais Rospoli ?

— Oui. Êtes-vous passée rue du Cours ?

— Sans doute.

— Eh bien ! avez-vous remarqué deux fenêtres tendues de damas jaune et une fenêtre tendue de damas blanc avec une croix rouge ? Ces trois fenêtres étaient au comte.

— Ah çà ! mais c’est donc un nabab que cet homme ? Savez-vous ce que valent trois fenêtres comme celles-là pour huit jours de carnaval, et au palais Rospoli, c’est-à-dire dans la plus belle situation du Corso ?

— Deux ou trois cents écus romain.

— Dites deux ou trois mille.

— Ah diable !

— Et est-ce son île qui lui fait ce beau revenu ?

— Son île ? elle ne rapporte pas un bajocco.

— Pourquoi l’a-t-il achetée alors ?

— Par fantaisie.

— C’est donc un original ?

— Le fait est, dit Albert, qu’il m’a paru assez excentrique. S’il habitait Paris, s’il fréquentait nos spectacles, je vous dirais, mon cher, ou que c’est un mauvais plaisant qui pose, ou que c’est un pauvre diable que la littérature a perdu ; en vérité, il a fait ce matin deux ou trois sorties dignes de Didier ou d’Antony.