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— Il faut que je sache qui il est, dit Franz en se levant.

— Oh ! non, s’écria la comtesse ; non, ne me quittez pas, je compte sur vous pour me reconduire, et je vous garde.

— Comment ! véritablement, lui dit Franz en se penchant à son oreille, vous avez peur ?

— Écoutez, lui dit-elle, Byron m’a juré qu’il croyait aux vampires, il m’a dit qu’il en avait vu, il m’a dépeint leur visage, eh bien ! c’est absolument cela : ces cheveux noirs, ces grands yeux brillant d’une flamme étrange, cette pâleur mortelle ; puis, remarquez qu’il n’est pas avec une femme comme toutes les femmes, il est avec une étrangère… une Grecque… une schismatique… sans doute quelque magicienne comme lui. Je vous en prie, n’y allez pas. Demain mettez-vous à sa recherche si bon vous semble, mais aujourd’hui je vous déclare que je vous garde.

Franz insista.

— Écoutez, dit-elle en se levant, je m’en vais ; je ne puis rester jusqu’à la fin du spectacle, j’ai du monde chez moi ; seriez-vous assez peu galant pour me refuser votre compagnie ?

Il n’y avait d’autre réponse à faire que de prendre son chapeau, d’ouvrir la porte et de présenter son bras à la comtesse.

C’est ce qu’il fit.

La comtesse était véritablement fort émue ; et Franz lui-même ne pouvait échapper à une certaine terreur superstitieuse, d’autant plus naturelle que ce qui était chez la comtesse le produit d’une sensation instinctive, était chez lui le résultat d’un souvenir.

Il sentit qu’elle tremblait en montant en voiture.