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Tout enfant, le petit Vampa avait un caractère étrange. Un jour, à l’âge de sept ans, il était venu trouver le curé de Palestrina, et l’avait prié de lui apprendre à lire. C’était chose difficile ; car le jeune pâtre ne pouvait pas quitter son troupeau. Mais le bon curé allait tous les jours dire la messe à un pauvre petit bourg trop peu considérable pour payer un prêtre, et qui, n’ayant pas même de nom, était connu sous celui dell’ orgo. Il offrit à Luigi de se trouver sur son chemin à l’heure de son retour et de lui donner ainsi sa leçon, le prévenant que cette leçon serait courte et qu’il eût par conséquent à en profiter.

L’enfant accepta avec joie.

Tous les jours, Luigi menait paître son troupeau sur la route de Palestrina au Borgo ; tous les jours, à neuf heures du matin, le curé passait, le prêtre et l’enfant s’asseyaient sur le revers d’un fossé, et le petit pâtre prenait sa leçon dans le bréviaire du curé.

Au bout de trois mois il savait lire.

Ce n’était pas tout, il lui fallait maintenant apprendre à écrire.

Le prêtre fit faire par un professeur d’écriture de Rome trois alphabets : un en gros, un en moyen, et un en fin, et il lui montra qu’en suivant cet alphabet sur une ardoise il pouvait, à l’aide d’une pointe de fer, apprendre à écrire.

Le même soir, lorsque le troupeau fut rentré à la ferme, le petit Vampa courut chez le serrurier de Palestrina, prit un gros clou, le forgea, le martela, l’arrondit, et en fit une espèce de stylet antique.

Le lendemain il avait réuni une provision d’ardoises et se mettait à l’œuvre.

Au bout de trois mois il savait écrire.

Le curé, étonné de cette profonde intelligence et