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avait appris tous les signes maçonniques à l’aide desquels ces demi-pirates se reconnaissent entre eux.

Il avait passé et repassé vingt fois devant son île de Monte-Cristo, mais dans tout cela il n’avait pas une seule fois trouvé l’occasion d’y débarquer.

Il avait donc pris une résolution :

C’était, aussitôt que son engagement avec le patron de la Jeune-Amélie aurait pris fin, de louer une petite barque pour son propre compte (Dantès le pouvait, car dans ses différentes courses il avait amassé une centaine de piastres), et, sous un prétexte quelconque, de se rendre à l’île de Monte-Cristo.

Là il ferait en toute liberté ses recherches.

Non pas en toute liberté, car il serait, sans aucun doute, espionné par ceux qui l’auraient conduit.

Mais dans ce monde il faut bien risquer quelque chose.

La prison avait rendu Edmond prudent, et il aurait bien voulu ne rien risquer.

Mais il avait beau chercher dans son imagination, si féconde qu’elle fût, il ne trouvait pas d’autres moyens d’arriver à l’île tant souhaitée que de s’y faire conduire.

Dantès flottait dans cette hésitation, lorsque le patron, qui avait mis une grande confiance en lui, et qui avait grande envie de le garder à son service, le prit un soir par le bras et l’emmena dans une taverne de la via del Oglio, dans laquelle avait l’habitude de se réunir ce qu’il y a de mieux en contrebandiers à Livourne.

C’était là que se traitaient d’habitude les affaires de la côte. Déjà deux ou trois fois Dantès était entré dans cette Bourse maritime ; et en voyant ces hardis écumeurs que fournit tout un littoral de deux mille lieues de tour à peu près, il s’était demandé de quelle puissance ne disposerait pas un homme qui arriverait à donner