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— Mais ce feu, continua Franz, me semble plutôt un motif de sécurité que d’inquiétude ; des gens qui craindraient d’être vus n’auraient pas allumé ce feu.

— Oh ! cela ne veut rien dire, dit Gaetano ; si vous pouviez juger, au milieu de l’obscurité, de la position de l’île, vous verriez que, placé comme il l’est, ce feu ne peut être aperçu ni de la côte, ni de la Pianosa, mais seulement de la pleine mer.

— Ainsi vous craignez que ce feu ne nous annonce mauvaise compagnie ?

— C’est ce dont il faudra s’assurer, reprit Gaetano les yeux toujours fixés sur cette étoile terrestre.

— Et comment s’en assurer ?

— Vous allez voir.

À ces mots Gaetano tint conseil avec ses compagnons, et au bout de cinq minutes de discussion, on exécuta en silence une manœuvre à l’aide de laquelle en un instant on eut viré de bord ; alors on reprit la route qu’on venait de faire, et quelques secondes après ce changement de direction, le feu disparut, caché par quelque mouvement de terrain.

Alors le pilote imprima par le gouvernail une nouvelle direction au petit bâtiment, qui se rapprocha visiblement de l’île et qui bientôt ne s’en trouva plus éloigné que d’une cinquantaine de pas.

Gaetano abattit la voile, et la barque resta stationnaire.

Tout cela avait été fait dans le plus grand silence, et d’ailleurs, depuis le changement de route, pas une parole n’avait été prononcée à bord.

Gaetano, qui avait proposé l’expédition, en avait pris toute la responsabilité sur lui. Les quatre matelots ne le quittaient pas des yeux tout en préparant les avirons