— Vous avez épuisé toutes vos ressources ?
— Toutes.
— Et dans une demi-heure, dit Maximilien d’une voix sombre, notre nom est déshonoré !
— Le sang lave le déshonneur, dit Morrel.
— Vous avez raison, mon père, et je vous comprends.
Puis étendant la main vers les pistolets :
— Il y en a un pour vous et un pour moi, dit-il : merci !
Morrel lui arrêta la main.
— Et ta mère… et ta sœur… qui les nourrira ?
Un frisson courut par tout le corps du jeune homme.
— Mon père, dit-il, songez-vous que vous me dites de vivre ?
— Oui, je te le dis, reprit Morrel, car c’est ton devoir ; tu as l’esprit calme, fort, Maximilien… Maximilien, tu n’es pas un homme ordinaire ; je ne te commande rien, je ne t’ordonne rien, seulement je te dis : Examine ta situation comme si tu y étais étranger, et juge-la toi-même.
Le jeune homme réfléchit un instant, puis une expression de résignation sublime passa dans ses yeux ; seulement il ôta, d’un mouvement lent et triste, son épaulette et sa contre-épaulette, insignes de son grade.
— C’est bien, dit-il en tendant la main à Morrel, mourez en paix, mon père ! je vivrai.
Morrel fit un mouvement pour se jeter aux genoux de son fils. Maximilien l’attira à lui, et ces deux nobles cœurs battirent un instant l’un contre l’autre.
— Tu sais qu’il n’y a pas de ma faute ? dit Morrel.
Maximilien sourit.
— Je sais, mon père, que vous êtes le plus honnête homme que j’aie jamais connu.
— C’est bien, tout est dit : maintenant retourne près de ta mère et de ta sœur.