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retirèrent ; mais, en se retirant, la jeune fille lança à cet homme un coup d’œil sublime de supplication, auquel il répondit par un sourire qu’un froid observateur eût été étonné de voir éclore sur ce visage de glace. Les deux hommes restèrent seuls.

— Eh bien ! Monsieur, dit Morrel en se laissant retomber sur son fauteuil, vous avez tout vu, tout entendu, et je n’ai plus rien à vous apprendre.

— J’ai vu, Monsieur, dit l’Anglais, qu’il vous était arrivé un nouveau malheur immérité comme les autres, et cela m’a confirmé dans le désir que j’ai de vous être agréable.

— Monsieur ! dit Morrel.

— Voyons, continua l’étranger. Je suis un de vos principaux créanciers, n’est-ce pas ?

— Vous êtes du moins celui qui possédez les valeurs à plus courte échéance.

— Vous désirez un délai pour les payer ?

— Un délai pourrait me sauver l’honneur, et par conséquent la vie.

— Combien demandez-vous ?

Morrel hésita.

— Deux mois, dit-il.

— Bien, dit l’étranger, je vous en donne trois.

— Mais croyez-vous que la maison Thomson et French…

— Soyez tranquille, Monsieur, je prends tout sur moi. Nous sommes aujourd’hui le 5 juin.

— Oui.

— Eh bien, renouvelez-moi tous ces billets au 5 septembre ; et le 5 septembre, à onze heures du matin (la pendule marquait onze heures juste en ce moment), je me présenterai chez vous.