Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/282

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cependant il n’osa y rentrer : on pouvait avoir laissé quelque porte-clefs pour garder le mort.

Il resta donc muet, immobile et retenant sa respiration.

Au bout d’une heure, à peu près, le silence s’anima d’un faible bruit, qui alla croissant.

C’était le gouverneur qui revenait, suivi du médecin et de plusieurs officiers.

Il se fit un moment de silence : il était évident que le médecin s’approchait du lit et examinait le cadavre.

Bientôt les questions commencèrent.

Le médecin analysa le mal auquel le prisonnier avait succombé et déclara qu’il était mort.

Questions et réponses se faisaient avec une nonchalance qui indignait Dantès ; il lui semblait que tout le monde devait ressentir pour le pauvre abbé une partie de l’affection qu’il lui portait.

— Je suis fâché de ce que vous m’annoncez là, dit le gouverneur, répondant à cette certitude manifestée par le médecin que le vieillard était bien réellement mort, c’était un prisonnier doux, inoffensif, réjouissant avec sa folie et surtout facile à surveiller.

— Oh ! reprit le porte-clefs, on aurait pu ne pas le surveiller du tout, il serait bien resté cinquante ans ici, j’en réponds, celui-là, sans essayer de faire une seule tentative d’évasion.

— Cependant, reprit le gouverneur, je crois qu’il serait urgent, malgré votre conviction, non pas que je doute de votre science, mais pour ma propre responsabilité, de nous assurer si le prisonnier est bien réellement mort.

Il se fit un moment de silence absolu pendant lequel Dantès, toujours aux écoutes, estima que le médecin examinait et palpait une seconde fois le cadavre.