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avait également besoin d’argent pour en finir avec Louis XII, roi de France, encore terrible malgré ses derniers revers. Il s’agissait donc de faire une bonne spéculation, ce qui devenait difficile dans cette pauvre Italie épuisée.

« Sa Sainteté eut une idée. Elle résolut de faire deux cardinaux. »

En choisissant deux des grands personnages de Rome, deux riches surtout, voici ce qui revenait au saint-père de la spéculation : d’abord il avait à vendre les grandes charges et les emplois magnifiques dont ces deux cardinaux étaient en possession ; en outre il pouvait compter sur un prix très brillant de la vente de ces deux chapeaux.

Il restait une troisième part de spéculation, qui va apparaître bientôt.

Le pape et César Borgia trouvèrent d’abord les deux cardinaux futurs : c’était Jean Rospigliosi, qui tenait à lui seul quatre des plus hautes dignités du Saint-Siège, puis César Spada, l’un des plus nobles et des plus riches Romains. L’un et l’autre sentaient le prix, d’une pareille faveur du pape. Ils étaient ambitieux. Ceux-là trouvés, César trouva bientôt des acquéreurs pour leurs charges.

Il résulta que Rospigliosi et Spada payèrent pour être cardinaux, et que huit autres payèrent pour être ce qu’étaient auparavant les deux cardinaux de création nouvelle. Il entra huit cent mille écus dans les coffres des spéculateurs.

Passons à la dernière partie de la spéculation, il est temps. Le pape ayant comblé de caresses Rospigliosi et Spada, leur ayant conféré les insignes du cardinalat, sûr qu’ils avaient dû, pour acquitter la dette non fictive de leur reconnaissance, rapprocher et réaliser leur fortune