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— Pourquoi cela ? demanda le jeune homme ; comptiez-vous donc mourir ?

— Non ; mais tout est prêt pour votre fuite, et je comptais que vous fuiriez.

La rougeur de l’indignation colora les joues de Dantès.

— Sans vous ! s’écria-t-il ; m’avez-vous véritablement cru capable de cela ?

— À présent, je vois que je m’étais trompé, dit le malade. Ah ! je suis bien faible, bien brisé, bien anéanti.

— Courage, vos forces reviendront, dit Dantès, s’asseyant près du lit de Faria et lui prenant les mains.

L’abbé secoua la tête.

— La dernière fois, dit-il, l’accès dura une demi-heure, après quoi j’eus faim et me relevai seul ; aujourd’hui, je ne puis remuer ni ma jambe ni mon bras droit ; ma tête est embarrassée, ce qui prouve un épanchement au cerveau. La troisième fois, j’en resterai paralysé entièrement ou je mourrai sur le coup.

— Non, non, rassurez-vous, vous ne mourrez pas ; ce troisième accès, s’il vous prend, vous trouvera libre. Nous vous sauverons comme cette fois, et mieux que cette fois, car nous aurons tous les secours nécessaires.

— Mon ami, dit le vieillard, ne vous abusez pas, la crise qui vient de se passer m’a condamné à une prison perpétuelle : pour fuir, il faut pouvoir marcher.

— Eh bien ! nous attendrons huit jours, un mois, deux mois, s’il le faut ; dans cet intervalle, vos forces reviendront ; tout est préparé pour notre fuite, et nous avons la liberté d’en choisir l’heure et le moment. Le jour où vous vous sentirez assez de forces pour nager, eh bien ! ce jour-là, nous mettrons notre projet à exécution.

— Je ne nagerai plus, dit Faria, ce bras est paralysé,